Sortie de résidence en octobre 2024
Pièce pour une machine, une danseuse et des spectateurs. SonIA est un projet de création qui interroge l’ambivalence de l’intelligence artificielle à la croisée des arts et des sciences.
Mené par Marie Vauzelle, ce spectacle met en scène une jeune chercheuse et l’objet de sa thèse : un drone doté d’IA. L’humaine et la machine interagissent, laissant paraître le lien sensible qui les unit. C’est la poésie de la science, de la recherche fondamentale que l’artiste désire transmettre. Pour mieux la saisir, elle a été accueillie au Laboratoire d’analyse et d’architecture des systèmes (LAAS) dans l’équipe de Simon Lacroix, directeur de recherche en IA et robotique.
MV : L’idée de SonIA a germé lors du Groupe Artistique d’Exploration Scientifique (GAES) en avril 2022 à Toulouse. Rassemblant artistes et chercheurs sur le thème de l’intelligence artificielle, cette conversation entre différents imaginaires m’a fascinée. Loin des fantasmes que génère l’IA, il y a chez les scientifiques un rapport complexe aux machines, à la fois distancié et intime. J’en suis repartie avec l’envie de me pencher sur la relation entre les chercheurs et leur activité de recherche. Cette exploration s’est poursuivie dans l’équipe dirigée par Simon. Au fil des discussions, nous avons tissé des liens autour du projet.
SL : Je me vois comme un facilitateur dans le travail de Marie. J’ai toujours aimé cette conversation qui s’ouvre avec les artistes, leurs questions profondes, parfois dérangeantes. Ces occasions de dialogue sont d’une richesse insoupçonnée.
SonIA est une création mêlant à la fois danse, théâtre, vidéo, son et robotique. Les deux protagonistes se meuvent dans une volière sous les yeux du public. Ce dernier circule librement autour. Sans s’en rendre compte, il fait également partie de la pièce : le robot capte ses mouvements et ses réactions en direct, puis ces données sont traduites pour générer une vidéo projetée dans l’espace scénique. En plus de l’aspect poétique, se posent ainsi des questions éthiques, esthétiques et techniques qui évoluent à mesure des avancées du projet.
MV : On a pu valider les qualités théâtrales du duo artiste-drone lors d’un premier travail de plateau en septembre 2023. Il reste maintenant à concevoir le drone. Initialement, je rêvais qu’on crée un drone intelligent avec le LAAS. Je pense finalement qu’on utilisera un modèle commercial amélioré, équipé d’une caméra.
SL : Nous accompagnerons Marie dans la conception de cette machine. Nous voulons accueillir un stagiaire qui travaillera sur la personnalisation du drone pour la pièce.
Née d’un regard artiste sur un laboratoire où l’intelligence artificielle se réalise, SonIA s’est finalement changée en co-création avec les scientifiques qui le composent. Dans cette aventure, les approches se nourrissent l’une l’autre, rappelant qu’arts et sciences ne sont pas si étrangers.
MV : Travaillant tous deux pour le public, nous adoptons une démarche semblable d’ouverture aux publics, avec pour vocation de partager nos recherches. Au niveau de nos façons de travailler aussi, je remarque beaucoup de ressemblances : nous posons des hypothèses, nous les éprouvons, de nouvelles questions se posent, modifiant l’hypothèse de départ et le protocole de recherche… C’est un travail sans fin !
SL : En effet, nous passons notre vie à chercher : chercher à comprendre et chercher à faire. Deux activités intimement liées, car sans comprendre, on ne fait pas bien et en cherchant à faire, on cherche à comprendre. On ne sait pas bien ce qu’on cherche, mais ce qui est sûr, c’est qu’on ne cherche pas à produire ce qu’on sait déjà faire.
Une première représentation du spectacle s’est déroulée le 5 octobre 2024 dans le Jardin du Grand Rond.
Simon Lacroix
Simon Lacroix est chercheur au LAAS/CNRS et responsable de l’équipe « Robotique et InteractionS ». À l’initiative des activités en robotique aérienne du laboratoire, il concentre aujourd’hui ses recherches sur le déploiement d’équipes de robots autonomes hétérogènes. Ses intérêts principaux concernent la perception et la navigation pour des machines terrestres et aériennes, et ont évolué vers les processus décisionnels nécessaires à la coopération au sein de flottes de robots autonomes.